Tout au long de leur vie, les baby-boomers ont accumulé de la richesse comme personne avant eux. D’ici 30 ans, les baby-boomers auront transmis leur patrimoine aux générations suivantes. Ce transfert, et le partage des actifs qui en découle, n’a rien d’anodin. Comment doit-il être appréhendé?
C’est le transfert de richesse du siècle ! D’ici une vingtaine d’années, une très grande partie de la richesse actuellement possédée par les baby-boomers, les personnes nées entre 1945 et 1964, passera entre les mains des générations suivantes. Cette transmission n’a rien d’anodin. Elle est appréhendée avec sérieux par les familles fortunées.
C’est en effet aux États-Unis et en Europe que s’est principalement créée la richesse au cours des décennies passées. La génération des individus nés après la Deuxième Guerre mondiale, participant à une explosion démographique dans nos contrées, a connu des années particulièrement prospères.
On constate que c’est aux États-Unis et en Europe que se concentre l’essentiel de la richesse mondiale. De manière générale, c’est aussi chez nous que les personnes fortunées sont les plus âgées.
Tout au long de leur vie, les baby-boomers ont accumulé de la richesse comme personne avant eux.
Une richesse colossale
Les estimations sur le montant de ce transfert divergent fortement selon les études. Rien qu’aux États-Unis, l’une d’elles estime que les baby-boomers devraient transférer 30 billions de dollars de richesse aux générations futures au cours des prochaines années. À l’échelle globale, une autre source évoque un montant de 68 billions de dollars. On estime à 15,4 billions de dollars la somme des transferts de fonds mondiaux d’ici 2030, dont 3,2 billions uniquement en Europe. Ces chiffres ne relateraient que les actifs contrôlés par les familles les plus importantes, autrement dit les high net worth individuals, dont la fortune est supérieure à 5 millions d’euros.
Cette transition ne survient pas de manière soudaine. Elle va s’étaler sur les 20 à 30 prochaines années. Les baby-boomers les plus âgés ont aujourd’hui 75 ans, et on peut encore leur souhaiter quelques années de vie heureuse. Les plus jeunes n’ont que 55 ans. En outre, leurs héritiers en ligne directe, à savoir leurs enfants, sont les plus souvent déjà bien installés dans la vie, avec déjà une réelle culture financière. Dès lors, quand vient le moment d’appréhender ce transfert, on parle plus d’évolution que de révolution. Dans beaucoup de cas, cette transmission est déjà à l’œuvre.
Le transfert de la richesse va donc, indéniablement, profiter aux générations suivantes, faisant de celle qui hérite la plus riche que le monde n’ait jamais connue. Souvent, ces héritiers sont déjà millionnaires. Cette transmission ne profite pas encore aux membres de la génération des millennials qui s’apprêtent à se lancer dans la vie active. Mais ceux-ci pourront néanmoins espérer hériter de leurs parents, d’ici quelques années, pour devenir à leur tour les plus riches de l’histoire… pour peu que la richesse familiale n’ait pas été dilapidée entre-temps.
Préserver l’unité du patrimoine
Et c’est tout l’enjeu de cette problématique de transfert pour les plus âgés: s’organiser pour garantir la préservation de ce patrimoine accumulé au fil des années.
En la matière, les enjeux de succession ne sont pas forcément simples à appréhender. Et c’est justement le rôle du conseiller d’aider les familles à mieux envisager la gestion de leur patrimoine au-delà de la succession. Cela implique de l’anticipation, une planification tenant compte de l’ensemble de la famille, une préparation des futurs détenteurs de ce patrimoine.
Les difficultés, dans le cadre de ce transfert générationnel, résident dans la complexité des familles et la diversité des actifs, les uns et les autres étant désormais ancrés sur un large territoire transfrontalier. L’ensemble implique notamment de tenir compte d’éléments légaux et fiscaux, comme les droits de succession, dépendant tantôt du pays de résidence des parents, tantôt de celui des enfants. Pour bien appréhender ces enjeux, il faut donc, le plus souvent, recourir à une boîte à outils qui soit bien étoffée et bien maîtrisée.
Appréhender les actifs dans leur complexité
Quand les actifs sont essentiellement financiers, sous forme d’actions ou d’obligations, la transmission peut être relativement simple. Un des enjeux sera de limiter les droits sur la succession. Dans beaucoup de cas, cependant, il y aura une volonté exprimée par les détenteurs du patrimoine d’inscrire la succession au cœur d’une démarche familiale, de rassembler les membres et de mettre en place une action commune. Cela implique de pouvoir entreprendre, bien avant la succession, une réelle réflexion mobilisant les représentants des diverses branches de la famille et de parvenir à les réunir autour d’une charte ou d’une gouvernance commune.
D’autres actifs sont autrement plus complexes à transmettre, comme une entreprise familiale toujours opérationnelle.
Pour un entrepreneur toujours à la tête d’une activité opérationnelle, cet enjeu de transmission doit prendre en compte de nombreuses problématiques d’ordre fiscal, juridique ou encore civil, comme des situations d’indivision par exemple. Plus qu’un patrimoine, le patriarche sera soucieux de garantir la pérennité de l’entreprise, en cherchant par exemple à en confier les rênes à ses héritiers.
Maintenir un actif opérationnel implique de faire monter les héritiers à bord du projet de société, qu’ils aient à la fois la volonté et la capacité de prendre le relais. À l’échelle d’une famille, cependant, certains vont souhaiter prendre une part active dans la gestion de l’entreprise familiale alors que d’autres non. En matière de succession, en vue d’éviter notamment des complications juridiques, mais aussi des dissensions, il est important de bien identifier les attentes des héritiers et de trouver des solutions, autour d’une gouvernance bien établie, pour que chacun y trouve son compte.
Quand certains désireront prendre une part active au développement de l’entreprise, d’autres se contenteront d’être des actionnaires dormants. Les uns et les autres n’auront pas les mêmes prérogatives et les mêmes attentes. Il est possible aussi que des héritiers ne souhaitent pas prendre part à un tel projet. Il convient alors d’anticiper leur retrait, ce qui peut impliquer des cessions de patrimoine ou la nécessité de trouver des financements, ces actifs étant au final très peu liquides.
Le champ des possibilités est très important. Selon la nature des actifs, l’enjeu sera de mettre en place les bons outils et les bonnes structures permettant de respecter à la fois les volontés du patriarche et les attentes des héritiers. Une telle réflexion s’impose également pour d’autres types d’actifs peu liquides par nature, tels que l’immobilier, par exemple une propriété familiale d’exception ou plusieurs résidences secondaires aux quatre coins de la planète, ou encore une collection d’œuvres d’art.
L’enjeu, pour beaucoup de familles, sera de veiller à conserver une unité sur ce patrimoine tout en anticipant le comportement de la génération suivante vis-à-vis de ces actifs plus ou moins liquides.
Changement d’époque
Quel rapport entretient la génération des héritiers vis-à-vis de la richesse? La manière de la gérer est-elle forcément alignée avec celle de leurs aïeuls? En la matière, la situation peut fortement varier d’une famille à l’autre. Dans le cas d’un entrepreneur qui a créé l’entreprise et l’a fait prospérer, accumulant de la richesse, la dynamique est le plus souvent reconduite à travers la génération suivante. C’est moins souvent le cas à la troisième ou quatrième génération, avec des membres qui se contentent davantage de recueillir le fruit du patrimoine sans forcément prendre part à la démarche entrepreneuriale.
En matière d’investissements, les exigences des nouvelles générations sont sensiblement différentes. Quand ceux qui ont connu la guerre ont avant tout été animés par la volonté de protéger leur patrimoine, leurs enfants ont cherché à le faire prospérer, suivant des logiques de rentabilité et de rendement financier. Aujourd’hui, évoluant dans un monde plus incertain et étant confrontée à des enjeux sociétaux et environnementaux forts, la génération qui va profiter de ce transfert d’argent s’oriente plus volontiers vers des investissements responsables.
Les actifs classiques représentent toujours la part la plus importante du patrimoine. Mais on constate un mouvement, d’une part, vers des investissements plus tangibles, comme le private equity et l’immobilier, et d’autre part vers tout ce qui est susceptible de contribuer à un monde plus durable. Il y a une véritable recherche d’une dimension éthique à travers les investissements voulus par les clients fortunés aujourd’hui.
Ne rien laisser à ses enfants
Certaines personnes jouissant d’un patrimoine constitué à la sueur de leur front ne veulent pas transmettre leurs actifs à leurs enfants. Parce qu’ils les jugent non aptes à gérer une telle fortune, ou encore parce qu’ils souhaitent, d’une manière ou d’une autre, rendre à la société une partie de la richesse accumulée. Une grande partie de cette richesse pourrait être dépensée dans un large éventail de domaines, notamment les vacances, les loisirs, les dépenses quotidiennes, les frais médicaux et les services de santé, avant la succession. Une étude menée par gransnet.com a révélé qu’environ 19% des baby-boomers prévoient de ne laisser aucun héritage à leurs enfants.
Des personnes fortunées pourraient, par exemple, placer une partie de leur fortune au sein d’une fondation et décider de ne transmettre directement à leurs enfants que le nécessaire pour subvenir à leurs besoins.
De nouveaux actifs à aller chercher
À ce titre, il faut regarder où se trouve la richesse aujourd’hui. Or, si l’on regarde les endroits du monde où l’on a généré le plus de richesse ces dix dernières années, on se rend compte que c’est davantage en Asie qu’en Europe. Les États-Unis ont toujours le vent en poupe.
Souvent, d’ailleurs, les héritiers développent des activités dans ces zones géographiques porteuse.
Le plus grand transfert de richesse de l’histoire va donc s’opérer en douceur. Les gagnants seront ceux qui parviendront à bien anticiper ces enjeux de succession. Les perdants seront ceux qui ne se seront pas suffisamment préparés. Mieux vaut prévenir…