Vous voulez aider sans vous démunir et préserver une équité entre vos héritiers ?
Ne prenez pas le risque que le prêt ne soit requalifié en donation par le fisc.
Votre aîné achète son logement, le second passe un mauvais cap, n’hésitez pas à leur avancer de l’argent. Vous pouvez les aider sans vous démunir définitivement en leur accordant un prêt, moyennant ou non intérêt, à condition de prévoir son remboursement, car le fisc surveille les prêts en famille.
Il recherchera s’il masque une volonté d’alléger une succession. «S’il démontre l’intention libérale du prêteur, l’emprunt sera requalifié en donation, avec à la clé les droits à payer sur les donations majorées de pénalités de retard et les sommes ainsi obtenues par l’emprunteur pourraient être imposées comme un revenu. La charge de la preuve incombe aux services fiscaux.
À vous de montrer qu’il s’agit d’une aide familiale, pas d’une donation déguisée ou d'une manœuvre pour diminuer l'IFI de l'emprunteur. Avant de vous lancer dans les formalités, interrogez-vous bien sur les objectifs de cette aide.
1 - Assurez-vous que le prêt est la formule la plus adaptée
Pour aider votre proche, veillez à ce qu’il puisse vous rembourser ou que vous puissiez effacer cette dette par une donation en bonne et due forme.
Vous pouvez accorder un prêt d’attente avant d’englober ce prêt dans une donation simple ou une donation-partage entre vos héritiers de manière à préserver l’équité entre vos enfants.
La donation-partage permet aussi de fixer la valeur des biens donnés aux uns et aux autres à la différence d’une donation simple qui est rapportée à la succession. Dans ce cas, fixez un terme suffisamment lointain et prévoyez dans l’attente des remboursements modérés.
2 - Respectez les modalités de remboursement
Assurez-vous que les restitutions restent traçables. On ne rembourse pas de la main à la main mais avec un virement ou un chèque qui laisse une trace sur un compte bancaire.
Bien sûr, en famille on peut s’octroyer une certaine souplesse avec des retards de paiement en cas de besoin mais, en cas de suspension prolongée, il est conseillé d’établir une nouvelle reconnaissance de dette précisant les circonstances et les raisons de cette interruption.
«Le débiteur devra être prêt à démontrer par tous moyens, son intention de rembourser, sa capacité à le faire et les raisons qui ont empêché un remboursement jusqu’alors», prévient Charly Tournayre, responsable de l’ingénierie patrimoniale chez Thésaurus.
3 - Évitez que le prêt ne prenne un caractère répétitif
Par exemple, n’alignez pas de nouvelles sommes tous les six mois : le prêt risquerait alors de se voir requalifié en pension alimentaire et donc en revenu imposable pour l’emprunteur.
En revanche, si votre enfant majeur est réellement dans le besoin et que vous pouvez bénéficier d’une exonération fiscale pour le versement d’une pension alimentaire entre parents en ligne directe (incluant gendre ou belle-fille ou beaux-parents), puisque le Code civil prévoit cette obligation d’entretien, versez-la, comme telle (déductibilité limitée à 5.795 euros par enfant majeur en 2017).
4 - Simplifiez-vous la vie avec un prêt à taux zéro
Si vous prévoyez un intérêt, l’emprunteur devra le déclarer sur l’imprimé n° 2561 (en plus de l’imprimé n° 2062). Et chaque année, le prêteur devra le mentionner sur sa déclaration de revenus, dans la rubrique des revenus de capitaux mobiliers, et s’acquitter dessus du PFU…
L’intérêt ne peut dépasser les taux de l'usure fixés par la Banque de France (novembre 2019 : 5,89% pour un crédit de trésorerie de plus de 6.000 euros, 2,83% pour un prêt immobilier de moins de dix ans, 2,85% entre dix et vingt ans).
La référence usuelle est la rémunération du Livret A (0,75%, puis 0,50 % à partir du 1er janvier 2020). Ce n’est pas d’avoir prévu un intérêt qui évitera à un prêt d’être requalifié en donation, c’est l’absence de remboursement.
5 - Remplissez au moins les formalités minimales
Rédigez une reconnaissance de dette en deux exemplaires, dûment datée et signée par les deux parties, dont chacun conservera un exemplaire.
Vous devez faire enregistrer le prêt auprès des services fiscaux, dès lors qu’il dépasse 760 euros (même s’il n’est pas écrit), en précisant bien les modalités de remboursement du prêt et les éventuels intérêts.
L’emprunteur et le prêteur remplissent chacun l'imprimé Cerfa n° 2062 «Déclaration de contrat de prêt» et l’adressent au service des impôts des particuliers, au plus tard en même temps que leur déclaration d’impôt.
Si l’emprunteur acquitte des intérêts, il remplit aussi le formulaire n° 2561 et le prêteur doit les déclarer sur sa déclaration de revenus. Un amendement voté dans le cadre du projet de loi de finances pour 2019 met, à compter du 1er janvier 2020, l’exonération sous conditions d’impôt sur le revenu. À défaut, le contrevenant se verrait exposé à une amende de 150 euros.
Si le débiteur emprunte à plusieurs personnes, il doit aussi produire un récapitulatif de prêts (de même celui qui accorde plusieurs prêts).
Le Code civil (article 1359) impose l’établissement d’un écrit au-delà de 1 500 euros (montant fixé par décret du 20 août 2004). L’acte doit mentionner : le montant du prêt en chiffres et en lettres, la date de remboursement, l’échéancier précisant les dates et le montant des échéances, le taux d’intérêt ou l’absence d’intérêts. Cet acte peut prendre la forme de votre choix : acte notarié, acte d’avocat ou simple lettre signée des deux parties (acte sous-seing privé).
6 - Assurez votre sécurité et celle de vos ayants droit
Un premier niveau de garantie s’obtient en faisant enregistrer votre contrat de prêt auprès des services fiscaux au Centre des finances publiques le plus proche de votre domicile. Cela lui confère une date certaine à l'égard des tiers. Coût : 125 euros.
Sans cet enregistrement, en cas de décès prématuré de l’emprunteur par exemple, le prêteur ne peut porter cette reconnaissance de dette au passif de la succession du défunt. Autrement dit, avec cette formalité, le prêteur peut contraindre le conjoint ou tout autre héritier de l’emprunteur à le rembourser.
Un niveau supérieur de sécurité s’obtient en passant par un notaire. C’est alors lui qui rédige et adresse le contrat de prêt aux services fiscaux, au plus tard le 15 février de l’année suivant celle de la conclusion du prêt. Les frais sont plus élevés mais la protection aussi.
Le notaire donne à votre reconnaissance de dette la force d’un acte authentique : en cas d’incident de paiement le prêteur muni de cet acte authentique n’a pas besoin de se rendre devant le tribunal pour engager un huissier de justice. Il peut le faire directement. Alors qu’avec une simple reconnaissance de dette sous-seing privé, il faut d’abord obtenir un jugement au tribunal.
Le notaire peut aussi établir une hypothèque. Il vérifie alors l’état hypothécaire des biens de l’emprunteur et signale au prêteur, s‘il est le premier créancier ou si d’autres sont déjà sur les rangs. Coût pour un prêt de 100.000 euros : 870 euros si le prêt est simple, 1.750 euros (TTC) dont 488 euros d’émoluments pour un prêt hypothécaire.
7 - L’emprunteur ne déduit la dette à l’IFI que si c’est justifié
Car depuis que l’IFI a remplacé l’ISF, les dettes entre les membres d’un même foyer fiscal ne sont plus déductibles de l’IFI (CGI 974, III) sauf à justifier du caractère normal du prêt.
Autrement dit, il faut que le bénéficiaire en ait besoin, que le prêt corresponde à l’achat d’un bien assujetti à l’IFI (acquisition du logement, de SCPI, travaux) et respecter à la lettre les formalités de déclaration et remboursement.
Prêteur âgé, absence de remboursement : la Cour de cassation a tranché
• Un arrêt de la Cour de cassation du 7 mars 2018 (n° 16-26.689) requalifie un prêt d’une grand-mère à son petit-fils en donation. Parmi le faisceau d’indices figure l’âge avancé du prêteur qui devait atteindre l'âge de 99 ans au terme de la convention et qui rendait improbable un remboursement de son vivant et l’absence de paiement des intérêts prévus, la prorogation d’un contrat initial de dix ans, une durée de sept années après le versement de la somme initialement prêtée sans le moindre remboursement ni paiement d'intérêt. Le petit-fils argumentait qu’il s’agissait de rénover des biens immobiliers dégradés et que les prêts étaient consentis au fur et à mesure des besoins. Le fisc, lui, a souligné que le patrimoine de ce dernier lui permettait de les financer sans recourir au prêt familial. Le petit-fils avait inscrit la dette à son passif ISF.
• Un arrêt de la Cour de cassation le 8 février 2017 (n° 15-21366) requalifie le prêt d’une mère à son fils en donation. «Les juges ont considéré que l’absence de taux d’intérêt, le nombre de prêts, l’âge du préteur, le lien de parenté et l’absence de tout remboursement constituaient un faisceau d’indices justifiant de l’intention libérale et la requalification du prêt en donation», relève Me Marie Monmarché, notaire à Joué-les-Tours (Indre-et-Loire). Là encore, le fils avait inscrit la dette à son passif ISF.
• Un arrêt de la Cour de cassation du 11 octobre 2017 (n° 16-21419) assimile un logement à titre gratuit à un prêt d’usage «n’opérant aucun transfert de droit patrimonial au profit du bénéficiaire». Il déboute les autres héritiers qui en demandaient le rapport à la succession.
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